Mise en œuvre des délibérations : Étude de cas de l’audit à l’Agence pour les infrastructures de transport
Auteurs : Walisson Alan Correia de Almeida et Luiz Fernando Ururahy de Souza, Auditeurs fédéraux du contrôle externe, Tribunal de Contas da União
1 – Introduction
L’Institution supérieure de contrôle des finances publiques (ISC) du Brésil, connue sous le nom de Tribunal de Contas da União (TCU), est chargée de superviser la gestion comptable, financière, budgétaire, opérationnelle et patrimoniale de l’entité fédérale afin de garantir la légalité, la légitimité et l’économie. La Constitution fédérale de 1988 habilite la TCU à faire respecter la loi en fixant des délais pour la mise en œuvre des mesures correctives nécessaires en cas de détection d’une illégalité.
La TCU est habilitée à émettre deux types de délibérations : les décisions et les recommandations. Les décisions sont obligatoires et exigent du bénéficiaire qu’il prenne des mesures spécifiques et immédiates pour prévenir ou corriger les irrégularités, supprimer leurs effets ou éviter l’exécution d’actes irréguliers dans un délai déterminé. Les recommandations, quant à elles, sont collaboratives et offrent au destinataire des possibilités d’amélioration des pratiques de gestion, des politiques publiques et des programmes gouvernementaux.
Le suivi est un outil essentiel qui permet à la TCU de vérifier l’exécution et l’efficacité de ses décisions et de ses recommandations. Contrairement au suivi, qui implique une surveillance continue des politiques publiques et des programmes gouvernementaux, le contrôle évalue spécifiquement le respect et l’impact des délibérations de la TCU.
Cette étude présente une analyse de cas visant à évaluer l’influence d’une décision de la TCU, émise à la suite d’un audit d’une agence gouvernementale, sur l’utilisation efficace des ressources publiques. Elle explore l’impact du processus de suivi de l’UTC sur la performance de l’agence et cherche à identifier les stratégies réussies et les domaines nécessitant une amélioration. L’objectif est de tirer des leçons et des enseignements pratiques qui pourraient être utiles à d’autres ISC dans leurs fonctions de contrôle, contribuant ainsi au discours plus large sur la responsabilité du secteur public et la gestion des ressources.
2 – Contexte de l’étude de cas
L’agence qui gère la politique brésilienne en matière d’infrastructures de transport est connue sous le nom de Departamento Nacional de Infraestrutura de Transportes (DNIT). Un audit, le processus 013.068/2016-4, a été réalisé pour vérifier l’exécution de travaux d’entretien sur des tronçons routiers dans le cadre du Programme national de sécurité et de signalisation routières (programme BR-Legal), qui vise à renforcer la sécurité des routes fédérales relevant de la compétence du DNIT.
Cet audit s’inscrivait dans la continuité des audits précédents portant sur la sécurité routière dans les zones à fort taux d’accidents, qui ont permis de relever plusieurs irrégularités telles que le non-respect des normes techniques (largeur des voies, dévers, existence d’accotements), l’insuffisance de la signalisation et des éléments de sécurité, ainsi que des problèmes d’entretien et de propreté.
En outre, des retards dans la mise en œuvre des projets exécutifs ont été constatés, ce qui a encore retardé l’amélioration de la sécurité routière. En réponse, la TCU a réalisé un nouvel audit afin de réévaluer la politique de sécurité routière et de remédier aux lacunes identifiées.
3 – Développement de la détermination au cours de l’audit
Le principal problème abordé par l’audit était l’inclusion de tronçons routiers gérés par des agences d’État et de segments accordés au secteur privé dans l’avis d’appel d’offres du programme BR-Legal. En outre, l’audit a examiné le champ d’application des tronçons routiers non revêtus ou même non mis en œuvre.
Ainsi, les concurrents ont soumis des propositions englobant des services tout au long de l’extension des autoroutes mentionnées dans l’avis. Cependant, les adjudicataires exécutaient partiellement les contrats, sans réduction proportionnelle de la valeur. Au cours de l’audit, il a été vérifié que de telles occurrences étaient présentes dans plusieurs sections du programme.
À l’époque, la méthodologie utilisée par la TCU pour élaborer des décisions et des recommandations a été établie dans la résolution 265/2014.
Cette norme visait déjà à garantir que les décisions soient claires, exploitables et pertinentes pour les agences. Les décisions devraient être émises avec des délais définis pour la mise en œuvre et la communication à la TCU des mesures adoptées. Ou, dans les cas plus complexes, pour la présentation d’un plan d’action visant à résoudre le problème, exigeant la spécification des actions à adopter, des parties responsables et des délais de mise en œuvre.
Elle stipule également que les décisions doivent donner la priorité aux aspects pertinents pour corriger les principales déficiences identifiées lors de l’audit, et être basées sur des faits signalés ou des analyses effectuées. Les décisions mettent en évidence « ce » qui doit être amélioré ou corrigé sans prescrire « comment » effectuer une telle tâche et doivent être précédées d’une évaluation de la faisabilité de sa mise en œuvre.
Ainsi, la décision 2.828/2016-Plenary a déterminé que le DNIT réévalue tous les contrats dans le cadre du programme BR-Legal afin d’identifier et, si nécessaire, de supprimer les valeurs faisant référence à des services sur des autoroutes fédérales non mises en œuvre, en construction ou en dehors de sa juridiction. Le délai accordé était de 60 jours.
Cette décision est conforme aux objectifs et aux besoins du DNIT et du programme BR-Legal, car elle vise à une utilisation efficace des ressources publiques, en investissant dans des services effectivement réalisables et relevant de la compétence de l’agence.
Il est également observé que la décision se concentre sur la réévaluation des contrats de services non applicables en raison de la situation des autoroutes, qu’elle est basée sur des faits signalés ou des analyses effectuées dans le rapport de délibération et qu’elle laisse la possibilité d’apporter des corrections à la discrétion de l’agence.
Toutefois, il convient de noter qu’elle n’a pas été précédée d’une évaluation adéquate de la faisabilité de sa mise en œuvre, comme l’indique le maigre délai de 60 jours accordé. Cela suggère qu’il n’y a pas eu de prise en compte des capacités opérationnelles de l’agence et des défis pratiques qui pourraient survenir au cours du processus de réévaluation, comme nous le démontrerons ci-dessous.
4 – Suivi et mise en œuvre de la décision
L’ordonnance administrative 27/2009 décrit le suivi des décisions et des recommandations, qui englobe la planification, l’exécution, la rédaction des rapports et l’assurance qualité. La principale méthode utilisée par la TCU pour interagir avec les agences au cours de cette phase de suivi est la diligence, un processus utilisé pour demander les informations ou les documents nécessaires à l’examen des dossiers. Il s’agit notamment de fixer des délais pour la soumission de ces informations ou documents, essentiels pour clarifier les incertitudes, rassembler des preuves et vérifier l’exécution des décisions. L’objectif est de déterminer avec précision les faits afin de fournir une base solide aux décisions de la TCU.
Dans le cas contrôlé, le principal problème identifié était l’évaluation insuffisante de la faisabilité de la mise en œuvre des décisions. Cette surveillance n’a pas tenu compte des capacités opérationnelles de l’agence et des défis pratiques potentiels susceptibles d’apparaître au cours de la réévaluation des contrats.
La décision initiale avait été assortie d’un délai de 60 jours pour sa mise en œuvre. Cependant, elle n’a été considérée comme achevée qu’en 2019, soit près de trois ans après la décision initiale. La mise en œuvre s’est heurtée à plusieurs obstacles : un manque de personnel qualifié et des équipes surchargées ; une bureaucratie excessive, caractérisée par des procédures administratives complexes et la nécessité d’obtenir de nombreuses approbations ; et des changements de direction, qui ont perturbé la continuité de l’information, modifié les priorités et entraîné une certaine confusion concernant les décisions initiales.
Pour surmonter ces obstacles, le délai a été prolongé et de nombreuses diligences ont été émises. Cela montre que la TCU doit réévaluer ses procédures et renforcer la communication et la coordination avec les agences, depuis l’émission jusqu’au suivi des décisions, afin de garantir une mise en œuvre plus efficace et plus rapide.
5 – Impact sur le programme audité
Malgré les obstacles et les retards, les décisions de la TCU ont notamment profité au programme BR-Legal, comme le souligne la décision 2.232/2019-Plenary. Cette intervention a permis d’améliorer sensiblement la gestion et l’exécution du programme et d’en accroître l’efficacité.
Des économies significatives ont été réalisées en ajustant 57 des 109 contrats, ce qui a permis d’économiser environ 458 millions de R$ (environ 90 millions de dollars américains au taux de mai 2024). Cette réalisation met en évidence une meilleure allocation des ressources, alignant les dépenses sur les besoins réels du programme.
En outre, l’effort a mis en évidence la possibilité d’exécuter des services irréguliers, ce qui a permis de mettre en lumière les lacunes du programme. Les mesures correctives prises par la TCU, notamment l’ajustement des valeurs contractuelles, ont témoigné d’une volonté de transparence et de gestion responsable, réduisant ainsi les risques pour la trésorerie. Cette approche a non seulement permis de résoudre des problèmes immédiats, mais a également créé un précédent pour une gestion plus efficace des fonds publics, en garantissant la responsabilité et en minimisant les pertes financières potentielles.
6 – Construction participative des délibérations
Afin d’améliorer l’efficacité des actions de contrôle et la qualité des délibérations, la TCU a révisé sa méthodologie avec la résolution 315/2020. Cet ajustement met l’accent sur l’implication des entités auditées dans le processus de décision en partageant les rapports d’audit préliminaires contenant des projets de détermination ou de recommandation et en sollicitant leurs commentaires sur les impacts pratiques et les alternatives de la mise en œuvre dans un délai raisonnable.
La résolution impose d’intégrer les réponses des entités auditées dans les projets de délibération finaux. Si les entités auditées identifient des impacts négatifs ou suggèrent des solutions plus efficaces, la TCU doit justifier le maintien des propositions initiales. Ce processus garantit une approche inclusive, en prenant en compte les contributions des entités auditées dans les délibérations de la TCU, dans le but d’une prise de décision plus informée et plus efficace qui tienne compte des aspects pratiques et des améliorations potentielles suggérées par les entités auditées.
7 – Enseignements tirés et bonnes pratiques
L’étude de cas souligne l’importance d’évaluer correctement la faisabilité de la mise en œuvre des délibérations. Ignorer des capacités opérationnelles d’une agence peut conduire à des délais irréalistes et à des retards importants. Il est essentiel que les ISC analysent la capacité de l’organisme contrôlé à mettre en œuvre les recommandations dans les délais fixés, en tenant compte des défis potentiels.
Pour atténuer ce problème, la TCU a affiné sa communication avec les agences auditées, en favorisant un dialogue constructif et en permettant la présentation de commentaires et d’alternatives au cours du processus d’audit. L’accent mis sur la transparence et la justification des décisions est essentiel pour instaurer la confiance et la collaboration entre les entités. D’autres ISC pourraient adopter cette approche, en associant les organismes contrôlés au processus de délibération et en encourageant un dialogue permanent afin d’améliorer l’efficacité des audits.
Malgré les difficultés rencontrées, l’impact positif de l’audit et du suivi sur le programme audité a été notable, conduisant à des améliorations sensibles de la gestion et de l’exécution du programme. La réévaluation et la renégociation des contrats ont permis de réaliser d’importantes économies, ce qui démontre l’efficacité des audits et du suivi des ISC dans la promotion de l’efficience de l’allocation et la garantie d’une utilisation correcte des ressources publiques.