Quel est le rôle des institutions supérieures de contrôle en ce qui concerne les immigrants, les réfugiés et les apatrides ?
Dans sa lettre ouverte de janvier 2024, le président de l’Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI), le ministre Bruno Dantas, évoque le rôle de l’INTOSAI dans le traitement des questions de migration, d’égalité et d’inclusion.
La convention de 1951 sur les réfugiés, le protocole de 1967 et la convention de 1969 sur les réfugiés de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) définissent un migrant comme une personne qui se déplace à l’intérieur ou à l’extérieur de son pays d’origine. L’immigrant est une personne qui arrive d’un autre pays et l’émigrant est celui qui quitte son pays d’origine. Le terme de réfugié désigne une personne qui, craignant avec raison d’être persécutée et risquant d’être victime de violences ou de violations des droits de l’homme, est contrainte de quitter son pays d’origine pour demander une protection internationale. Quant aux apatrides, ils n’ont pas de nationalité et ne sont considérés comme ressortissants d’aucun pays. Ces personnes sont privées de leurs droits fondamentaux et font souvent l’objet de persécutions.
Les flux de migrants, de réfugiés et, dans une moindre mesure, d’apatrides, constituent un phénomène social et une réalité mondiale. Ce mouvement est façonné par divers scénarios et changements internationaux au cours de l’histoire. Il peut s’agir d’un déplacement forcé ou d’une relocalisation volontaire.
Selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), il y a actuellement 114 millions de personnes déplacées, principalement en raison de conflits. Filippo Grandi, chef du HCR, a décrit le phénomène comme “un symptôme tangible mais parfois négligé du désordre extrême actuel du monde” dans sa présentation annuelle au Conseil de sécurité des Nations unies, qui se tiendra en octobre 2023.
Toutefois, ces chiffres ne tiennent pas compte de toutes les personnes appartenant au groupe des immigrants, des réfugiés et des apatrides. Outre les conflits, d’autres facteurs, tels que les conditions socio-économiques et, plus récemment, les problèmes environnementaux, incitent les gens à franchir les frontières de leur pays. Les phénomènes climatiques extrêmes, tels que les ouragans, les sécheresses et les inondations, affectent directement la vie des communautés, les obligeant souvent à migrer à la recherche de conditions plus sûres et plus durables. Le rapport sur les migrations mondiales 2022, préparé par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), estime qu’en 2020, il y avait 281 millions de migrants internationaux dans le monde, ce qui équivaut à 3,6 % de la population mondiale. Ce nombre a augmenté au cours des dernières décennies et devrait encore augmenter dans les années à venir. Pour illustrer l’importance de cette tendance, le nombre total actuel de migrants internationaux est trois fois plus élevé que dans les années 1970.
Même s’il est fondamental de reconnaître que la migration peut apporter des avantages au pays de destination, y compris des avantages économiques, elle est souvent perçue comme une source de préjudice et de menace. C’est pourquoi de nombreux pays adoptent des politiques migratoires restrictives, qui augmentent souvent le risque d’exploitation et de traite des êtres humains pour les personnes qui ont besoin d’émigrer ou qui cherchent à le faire. Il est également important de considérer qu’un flux migratoire intense peut avoir des effets négatifs sur la fourniture de services publics, tels que l’éducation et la santé, en raison de l’augmentation inattendue de la demande.
Bien qu’un pays puisse avoir une législation progressiste et inclusive en matière de politiques publiques, il est important de souligner que le simple fait d’accorder une autorisation d’entrée ne suffit pas à garantir les droits de l’homme et la dignité des personnes arrivant dans le pays de destination. Un soutien minimal est indispensable et de nombreux défis sont à relever pour créer un environnement accueillant qui humanise et transforme véritablement la réalité de ces personnes.
La migration est une question à multiples facettes qui concerne les droits de l’homme des migrants, des réfugiés et des apatrides, qui se trouvent généralement dans des situations de grande vulnérabilité. Selon les données du HCR, environ 75 % des réfugiés dans le monde vivent dans la pauvreté (Refugees’ Access to Jobs and Financial Services, 2023). Dans ce contexte, les institutions supérieures de contrôle peuvent jouer un rôle important dans l’amélioration des conditions de vie de ces populations.
Nous pouvons effectuer différents types de travaux, non seulement pour évaluer la conformité, mais aussi pour identifier les risques et les possibilités d’amélioration des processus et des politiques liés à ces flux migratoires. Cela garantit la transparence vis-à-vis de la société et permet de suggérer des améliorations, si cela est jugé nécessaire et approprié.
L’Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI) soutient le programme Equal Futures Audit Changemakers de l’Initiative de développement de l’INTOSAI (IDI), auquel participent les institutions de contrôle de l’Argentine, du Brésil, du Chili, du Costa Rica, de l’Égypte, de l’Équateur, du Salvador, du Guatemala, du Honduras, de l’Indonésie, du Kosovo, du Liberia, des Maldives, de la Mauritanie, du Népal, des Pays-Bas, de la Palestine, du Paraguay, des Philippines, de la Serbie, de la Corée du Sud, de la Thaïlande, de la Tunisie, de Tuvalu, de l’Uruguay et de Vanuatu. Le projet vise à transformer un groupe d’auditeurs en agents efficaces du changement. Ils seront chargés d’élaborer une stratégie pour leurs institutions de contrôle respectives et de réaliser un audit sur les questions d’égalité et d’inclusion. La migration est l’une des principales causes d’inégalité abordées dans cette initiative.
La migration est également mentionnée dans les objectifs de développement durable de l’Agenda 2030 des Nations unies. Elle apparaît à la fois dans les différents objectifs et dans des objectifs spécifiques, tels que l’objectif stratégique 10 – Réduire les inégalités dans et entre les pays, dont l’un des objectifs est de “faciliter une migration et une mobilité ordonnée, sûre, régulière et responsable des personnes, par la mise en œuvre de politiques migratoires planifiées et bien gérées”.
Le phénomène croissant des migrations apparaît comme un défi crucial qui requiert l’attention des institutions supérieures de contrôle, soulignant la nécessité de stratégies et d’une coopération mondiales pour gérer l’afflux de réfugiés.
L’INTOSAI reconnaît l’importance des politiques publiques concernant les questions de migration en matière d’égalité et d’inclusion. En tant qu’institutions supérieures de contrôle, nous avons non seulement la capacité mais aussi le devoir d’apporter une valeur ajoutée à la société en matière de flux migratoires et de contribuer à l’édification d’un monde plus prospère, plus juste et plus égalitaire.