La transition énergétique dans le contexte de la crise climatique
Dans sa lettre ouverte de juin 2024, le président de l’Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI), le ministre Bruno Dantas, explique que l’énergie est essentielle à la croissance économique et au développement social, car elle alimente nos foyers, nos industries et nos sociétés. Au cœur de l’agenda mondial, il joue un rôle essentiel pour relever les défis urgents de notre époque en matière de développement durable.
L’Accord de Paris, signé en 2015 lors de la 21e Conférence des Parties (COP21), est apparu comme une stratégie mondiale visant à contrer la menace du changement climatique par des efforts de développement durable et d’éradication de la pauvreté. L’un des principaux engagements pris dans l’accord est de limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels.
Conformément à cette stratégie, l’Agenda 2030 des Nations unies (ONU), à travers ses 17 objectifs de développement durable (ODD), établit l’ODD 7 pour assurer l’accès de tous à une énergie abordable, fiable, durable et moderne.
Données de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) [1] indiquent que le secteur de l’énergie est responsable de plus de 75 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. En outre, l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) [2] indique que pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, il faut réduire les émissions de CO₂ et parvenir à des émissions nettes nulles dans le secteur de l’énergie d’ici à 2050. Cela nécessite une augmentation significative de la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique mondial, de 16 % en 2020 à 77 % en 2050, et un investissement total estimé à 150 000 milliards d’USD, avec une moyenne annuelle de plus de 5 000 milliards d’USD, ce qui représente environ quatre fois le niveau d’investissement actuel.
Cependant, le paysage mondial présente des disparités évidentes en ce qui concerne l’accessibilité et le caractère abordable des énergies propres. Les investissements dans les énergies renouvelables restent concentrés dans un nombre limité de pays et axés sur une gamme étroite de technologies, 85 % des investissements mondiaux bénéficiant à moins de 50 % de la population mondiale.
La COP28, qui se tiendra à Dubaï fin 2023, a présenté le premier bilan mondial de l’Accord de Paris, concluant que les activités humaines, principalement par le biais des émissions de gaz à effet de serre, ont provoqué un réchauffement climatique d’environ 1,1°C. Ces effets se font déjà sentir au niveau mondial, affectant de manière disproportionnée ceux qui ont le moins contribué à ces changements, et les pertes et dommages devraient s’intensifier avec la poursuite du réchauffement. En outre, les mesures d’adaptation sont fragmentées, progressives et inégales d’une région à l’autre, avec des lacunes importantes qui continueront à se creuser.
À la lumière des engagements contraignants pris par les nations, des niveaux alarmants des émissions du secteur de l’énergie et de l’intensification rapide des effets du changement climatique, la conférence a souligné la nécessité urgente d’une action décisive pour maintenir l’objectif de limitation du réchauffement de la planète, ce qui nécessite des efforts conjoints pour atténuer la crise, passer à des économies à faible émission de carbone et renforcer la résilience face aux effets de la crise climatique.
Des transitions énergétiques justes et inclusives sont essentielles pour réduire les émissions, améliorer l’efficacité énergétique et promouvoir l’équité. Face à l’urgence de la crise climatique et à l’impératif d’investissements publics et privés, les institutions supérieures de contrôle (ISC) jouent un rôle crucial dans le soutien à des transitions énergétiques équitables. Grâce à nos efforts, nous pouvons contribuer à renforcer les structures institutionnelles, à promouvoir un environnement favorable aux investissements et à des politiques publiques efficaces, et à garantir la transparence et la responsabilité en évaluant l’intégrité, l’efficience et l’efficacité des politiques liées aux transitions énergétiques. Il s’agit notamment de renforcer les institutions et les pratiques réglementaires, d’atténuer les risques financiers et de superviser les initiatives visant à accroître les investissements dans les énergies renouvelables, en particulier dans les pays en développement et les économies émergentes.
Une étude récente menée par le groupe de travail sur l’audit des industries extractives (WGEI) de l’Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI), impliquant 25 pays, a souligné les principaux défis auxquels les ISC sont confrontées lorsqu’elles réalisent des audits sur la transition énergétique. Les résultats indiquent que les ISC reconnaissent leur rôle dans ce domaine, plusieurs d’entre elles ayant déjà effectué des contrôles sur ce thème au cours des dernières années. Le Brésil se distingue comme un bon exemple, ayant réalisé un audit pilote et un audit coordonné en 2018 dans le cadre du groupe de travail sur l’audit des travaux publics de l’Organisation des institutions supérieures de contrôle des finances publiques d’Amérique latine et des Caraïbes (GTOP/OLACEFS), avec la participation des ISC du Chili, de la Colombie, du Costa Rica, de Cuba, de l’Équateur, du Salvador, du Guatemala, du Honduras, du Mexique, du Paraguay et du Venezuela. L’audit a permis d’identifier les meilleures pratiques et les possibilités d’amélioration des politiques en matière d’énergies renouvelables.
Cependant, la plupart des institutions supérieures de contrôle reconnaissent que leurs capacités techniques sont limitées pour relever les défis de la transition énergétique en raison du manque d’équipes qualifiées, de données limitées et de l’absence de méthodologies spécifiques. C’est pourquoi nous devons renforcer notre expertise technique afin de soutenir efficacement nos gouvernements grâce à des idées et des recommandations alignées sur les objectifs climatiques, promouvant ainsi le développement durable et la coopération mondiale.
Sous la présidence du Brésil, le G20 a donné la priorité à la promotion du développement durable, en abordant ses dimensions économiques, sociales et environnementales, y compris les transitions énergétiques. Dans ce contexte, l’ISC20, dirigée par l’UTC et ouverte à toutes les institutions supérieures de contrôle, a cherché à faire avancer ce débat et à contribuer à cet effort mondial, en mettant sur la table des questions vitales telles que la gouvernance, la réglementation, la transparence et la responsabilité, afin de catalyser des changements significatifs pour un avenir plus durable. Dans cet effort commun, la coopération entre les ISC est essentielle pour affirmer notre engagement à encourager et à promouvoir des politiques publiques plus efficaces et plus responsables, garantissant la prospérité et le bien-être de tous.
En travaillant ensemble, nous pouvons contribuer à la mise en place d’un environnement de gouvernance plus solide et plus transparent, ce qui est essentiel pour relever les défis urgents et complexes de notre époque.